Texte : Isabelle Aubailly
© photos : Zolivaprod
Au cœur du village de Saint-Hilaire-d’Ozilhan, entre Uzès et le Pont du Gard, La Belle Vie se dessine comme une adresse discrète cultivant l’art du repos et de l’hospitalité.
Dehors il pleut, nous entrons dans la salle chaleureuse de La Belle Vie. Des lames de bois au mur, rétroéclairées comme un tableau vivant, une cheminée, un bar aux mille bouteilles, c’est le nouveau repaire du chef Denis Martin. Nous l’avions laissé il y a à peine un an à la jolie table sétoise « The Marcel » avec une étoile décrochée en 2019. Aujourd’hui, il choisit de poser ses valises et son savoir-faire à La Belle Vie, pour y écrire une page plus personnelle.
Denis retrouve un peu sa terre natale dans ce village proche d’Avignon. Venu visiter ses parents à Saint-Hilaire-d’Ozilhan, il découvre par hasard, derrière un haut mur de pierres, cet ancien établissement. Tout de suite, il imagine une nouvelle vie, proche de sa famille et à son image. Avec son épouse Joana, ils redessinent cette adresse, des chambres confortables ouvertes sur un jardin secret, des pièces de réception chaleureuses, des terrasses ombragées et grand luxe, deux espaces piscines. Denis est heureux de faire revivre cette bâtisse bourgeoise au cœur du village.
Nous sommes accueillis par le maître de salle et son accent chantant nous ravit. Comme dans beaucoup de maisons de qualité, le service est discret, parfois drôle et toujours bienveillant. Posé sur un bloc de pierre brute, le cocktail du jour à base de sirop de châtaigne et vin blanc pétillant donne le ton de la maison. C’est une nouvelle vie, jeune, joyeuse et pleine de surprises que l’équipe autour de Denis a envie de vivre et faire vivre à ses visiteurs. La sommelière et le chef de partie ont suivi Denis dans cette aventure. Ils ont à cœur de la réussir.
On ouvre le bal avec la langoustine cuite au barbecue et ses dentelles de céleri rave accompagnées d’un crémeux à l’oseille et pomme verte. Toujours en quête des meilleurs produits, Denis s’entoure des meilleurs producteurs et il a gardé un attachement avec les poissons et crustacés sétois. Alchimiste du goût, à la manière d’un nez, il travaille à trouver la juste note de tête, de coeur et de fond. Oui c’est un véritable art et ici la langoustine a une saveur remarquable à la fois sucrée et douce.
Chaque plat raconte une histoire, celle d’un geste, d’un producteur, d’une émotion. La balade continue avec le rouget au vinaigre de fleur de sureau, amandes torréfiées, accompagné d’une soupe de roche. À la recherche du meilleur, Denis s’exécute et nous emporte avec lui. Il défend une cuisine d’auteur, épurée mais expressive, fondée sur le respect absolu du produit et l’ancrage dans le terroir provençal. Ici, pas d’effet de manche : des assiettes sincères, précises, profondément lisibles, qui traduisent l’amour du végétal, des cuissons justes, des herbes, des jus clairs, des produits locaux sourcés. Comme la mer, la terre est traitée avec grand respect. Son bœuf, cuit à la perfection avec patates douces et butternut, est généreux dans sa simplicité.
La carte évolue au fil des saisons et puise dans le patrimoine régional des inspirations revisitées avec finesse.
La pluie continue de tomber mais on s’en fiche quand le spectacle est dans l’assiette. Le maître de salle agrémente chaque plat d’une anecdote, à la méthode d’un conteur provençal.
Dernier tableau, le dessert orchestré par le chef-pâtissier Romain Berkrouber est à l’image de ce menu, sincère et sensible. C’est une poire rôtie, crémeux de vanille, nougatine d’une pâte sablée, à la précision rare. Onctuosité du crémeux, douceur de la poire et craquant du biscuit enchantent notre palais.
Denis vient échanger de longues minutes avec nous, on entend sa joie d’avoir réalisé son rêve : sa maison de famille gastronomique, conviviale et authentique. C’est la maison des amis, des épicuriens et des amoureux de belles histoires. Le village de Saint-Hilaire-d’Ozilhan va bientôt rayonner de cette étoile montante.
